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Balade architecturale dans le triangle d'or du 16e

Mise à jour le 05/10/2021
Le Castel Béranger
Depuis le début du XXe siècle, le 16e arrondissement est un terrain d'expérimentation architecturale. En compagnie de Mallet-Stevens, Le Corbusier, Sauvage ou encore Guimard, suivez-nous dans une petite balade au gré d'immeubles classés monuments historiques, parmi les plus plus remarquables du quartier.

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1. L'Hôtel Guimard

Difficile de ne pas débuter cette promenade par une réalisation d'Hector Guimard (représentant emblématique de l'Art nouveau), qui a particulièrement marqué de son empreinte le 16e arrondissement. On trouve sa signature sur nombre de bâtiments aisément reconnaissables, ainsi bien sûr qu'à l'orée de plusieurs stations de métro de l'arrondissement, puisque Guimard fut le concepteur des édicules portant son nom. Ornementé jusqu'à l'excès, baroque, voire boursouflé, son style apparaît aujourd'hui volontiers kitsch, mais il vaut le détour pour son côté spectaculaire et sa beauté presque anachroniques.
Marié en 1909 à la peintre américaine Adeline Oppenheim, l’architecte décide de construire cet hôtel particulier pour son propre compte, au 122, avenue Mozart, de 1909 à 1912. Il servait à la fois de cadre à son agence d’architecture, à sa résidence privée et à l’atelier de son épouse. Très exigüe, la parcelle de 90 m2 occupée par l'hôtel a la forme d’un triangle. Pour y placer son programme, Guimard conçut un bâtiment sur six niveaux doté d’un ascenseur et d’un escalier intérieur. Et pour augmenter la surface habitable, il eut recours à des fenêtres ventrues, à des bow-windows et à un encorbellement des façades à partir du 2e étage.
Le volume se présente comme une seule masse sculptée dans deux matériaux, la pierre et la brique. Guimard se permet une grande liberté formelle, notamment dans la répartition assez improbable des fenêtres et grandes baies aux différents étages, le balcon d’angle du 3e étage et l’aspect monumental de la porte d’entrée. Inspirés de la nature, les motifs de fleurs envahissent les encadrements en pierre des ouvertures et les ferronneries des balcons. Des auvents animent également les lucarnes de la toiture. A l’intérieur, Guimard fait de sa maison une œuvre d’art total en dessinant lui-même la décoration, les meubles et les radiateurs.
Le Petit Palais conserve ainsi un ensemble majeur de l’œuvre d’Hector Guimard, donné par sa veuve au musée en 1948, la salle à manger que l’architecte et décorateur a conçu en 1911 pour leur hôtel particulier de l’avenue Mozart. Celle-ci se compose d’un argentier et d’un vaisselier intégrés dans des boiseries, d’une table, de six chaises, de deux chaises à bras et d’un lustre qui ont été restaurés et remontés dans une salle spécialement aménagée au moment de la réouverture du Petit Palais en 2005.
Hector Guimard

Dans la mouvance artistique de son temps, Guimard fait figure de franc-tireur: il ne laisse aucun disciple derrière lui, ni aucune école. Cette absence de postérité contraste avec l'inventivité formelle et la profusion typologique de son œuvre architecturale et décorative, où l’architecte donne le meilleur de lui-même en une quinzaine d'années d’intense activité créatrice. Après le décès de Guimard, sa veuve proposera à l’Etat français de lui céder l’hôtel Guimard pour y aménager un musée, mais essuiera un refus, l’Art nouveau étant tombé en désuétude. L’hôtel est aujourd’hui séparé en appartements.
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2. Les maisons Roche et Jeanneret

Construites par Le Corbusier et son cousin Pierre Jeanneret, les Maisons La Roche et Jeanneret sont deux maisons mitoyennes situées au 8-10 Square du Docteur Blanche, conçues comme un ensemble architectural unique, mais qui ne relèvent pas du même "programme": la Maison La Roche est celle d’un riche collectionneur célibataire, tandis que la Maison Jeanneret répond aux besoins d’un couple avec trois enfants. Ces villas sont la première expression du Purisme et figurent dans la série de bâtiments de Le Corbusier, inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l'Unesco en 2016.
Dessinée en forme de L, la Maison La Roche comprend deux parties distinctes : une aile résidentielle dans le prolongement de la Maison Jeanneret voisine, et une aile dédiée à la galerie de tableaux d'Albert La Roche. Le Corbusier y révolutionne l’espace intérieur en développant une "promenade architecturale". L’architecture est ainsi conçue pour être appréciée en mouvement et se découvre dans le temps. La continuité spatiale est obtenue grâce à de nombreuses percées et à la suppression des cloisons et des portes.
La Maison Jeanneret est construite pour Albert Jeanneret, le frère de Le Corbusier, son épouse et leurs trois enfants. Expérimenté pour la première fois dans la Maison Jeanneret, le "plan retourné" renverse la disposition traditionnelle de la maison. Le jardin quitte la base du bâtiment pour en occuper le sommet, et l’étage réservé aux espaces de vie et de réception gagne le dernier niveau juste sous le toit-terrasse, proposant ainsi un nouvel art de vivre urbain.
Réunies en un ensemble architectural de formes géométriques pures dénuées de tout décor, les Maisons La Roche et Jeanneret constituent en 1923 une œuvre d’avant-garde unique en France et à l’échelle de la planète. Le Corbusier pose ici les bases de la nouvelle architecture moderne : pureté de la géométrie et absence de décor, donc, mais aussi pilotis, toit-terrasse et fenêtre en longueur. Les villas sont aujourd'hui le siège de la Fondation Le Corbusier, qui promeut l'œuvre de l'architecte et détient de nombreuses archives. Seule la villa La Roche se visite, et présente des collections de peintures, sculptures et du mobilier.
Le Corbusier

Charles-Édouard Jeanneret-Gris (1887-1965), plus connu sous le pseudonyme Le Corbusier, est un architecte, urbaniste, décorateur, peintre, sculpteur et auteur suisse, naturalisé français en 1930. Il est l'un des principaux représentants du mouvement moderne avec, entre autres, Ludwig Mies van der Rohe, Walter Gropius, Alvar Aalto et Theo van Doesburg.
Le Corbusier est connu pour être l'inventeur de "l'unité d'habitation", expression d'une réflexion théorique sur le logement collectif. Sa conception envisage dans un même bâtiment tous les équipements collectifs nécessaires à la vie. L'œuvre et la pensée de Le Corbusier ont été particulièrement influentes sur les générations d'architectes de l'après-guerre et largement diffusées avant d'entrer, avec la période du postmodernisme, dans une phase de contestation importante et régulière.

3. La Rue Mallet-Stevens

La rue Mallet-Stevens est une anomalie extraordinaire à Paris. Une rue entière "offerte" comme terrain de création à un architecte de renom, parmi les plus novateurs de son époque. Près d'un siècle après son édification, elle est toujours dans l'état qui était le sien à l'époque (même si les bâtiments vieillissent avec des fortunes diverses), et ouverte aux passants. Sans aucun commerce, elle apparaît comme un simple plaisir des yeux pour amateurs et amatrices d'architecture.
Commande d'un banquier pour lotir un terrain de 3 827 m2 dont il est propriétaire, la réalisation de la rue est confiée à Robert Mallet-Stevens en 1924. Âgé de 41 ans et œuvrant alors surtout comme décorateur de cinéma, l'architecte acquit un an plus tard une immense notoriété à la suite de l’Exposition internationale des arts décoratifs, où il construisit le spectaculaire Pavillon des renseignements et du tourisme.
C'est le 20 juillet 1927 que le Tout-Paris se presse dans le quartier d’Auteuil, où la rue est inaugurée en grande pompe. Pour Mallet-Stevens, elle constitue un véritable manifeste architectural. Bâtie sur le modèle des "villas" parisiennes, c’est une impasse de 77 mètres de long bordée de cinq hôtels particuliers aux volumes cubistes de proportions variées. Les bâtiments sont peints à l’enduit blanc souligné par des serrureries noires, percés de larges baies et surmontés de toits-terrasses. Ils ressemblent à des sculptures abstraites avec leurs empilements et porte-à-faux, et constituent un ensemble urbain cohérent, bien que tous soient singuliers.
Unique maître d’œuvre de "sa" rue, Mallet-Stevens s’est néanmoins entouré de collaborateurs reconnus à l’époque, dont le maître verrier Louis Barillet, la designer Charlotte Perriand ou encore le ferronnier Jean Prouvé, excusez du peu. La crise de 1929 aura toutefois raison du projet d'extension de la rue.
Si les hôtels particuliers ont été surélevés dans les années 1950 et si le mobilier urbain d’origine a disparu, la rue Mallet-Stevens reste un vestige remarquable de l’élan moderne architectural à Paris pendant l’entre-deux-guerres.
Robert Mallet Stevens

L'apport de Mallet-Stevens (1886-1965) n'a été pleinement apprécié que longtemps après sa mort. Même au-delà des années 1970, les historiens de l'architecture le considèrent comme un dandy ou un couturier… Ce n'est que dans les années 1980 que son œuvre a commencé à être reconnue comme une sorte d'optimum des années 1930, entre recherche esthétique et exigence de fonctionnalité. Cette redécouverte, marquée notamment par une rétrospective au Centre Georges-Pompidou en 2005, a entraîné la réhabilitation de plusieurs bâtiments. Il est aujourd'hui considéré comme l’une des figures majeures de l’architecture française de l’entre-deux-guerres.

4. Le Castel Béranger

Autre réalisation d'Hector Guimard dans le 16e arrondissement, considéré comme l'un de ses chefs-d'œuvre, le Castel Béranger est un immeuble d'habitation situé au 14, rue Jean-de-la-Fontaine. Il s'agit de la première réalisation majeure de l'architecte, qu'il a construite entre 1894 et 1898. D’abord dessiné dans un style rationaliste fidèle aux théories d’Eugène-Emmanuel Viollet-le-Duc, le projet se transforme et adopte la ligne courbe dans les décors, après le voyage d’Hector Guimard à Bruxelles en 1895 où il rencontre Victor Horta, maître incontesté de l’architecture Art nouveau en Belgique.
Située non loin de la Maison de Radio France, l'immeuble de 700 m² aimante les regards. Cent-vingt ans après être sorti de terre, l'excentricité de son style, qui valut à l'artiste d’être qualifié de fou, continue de détonner : une façade composée de pierres meulières et de briques, des balcons ouvragés à outrance et une entrée, l’une des plus belles de la capitale, œuvre d'art en elle-même. Une porte qui laisse entrevoir un vestibule recouvert de panneaux de grès et de grilles en fer forgé aux formes plus qu’étranges. Sur la façade, on découvre des hippocampes qui grimpent le long de l’immeuble, un chat, un oiseau, des crustacés, mais aussi d’imposants garde-corps et balcons tout en courbes et en ondulations. Le tout se déploie dans des tons clairs et lumineux, orangés, vert d’eau, beiges.
Ce vaste immeuble abrite alors une boutique et l’atelier de l’architecte au rez-de-chaussée, tandis que des appartements de trois et quatre pièces et des ateliers d’artistes occupent les étages. Œuvre d’art totale, le bâtiment a bénéficié d’un travail minutieux de l’architecte qui en dessine les moindres détails (tapis de sol, papiers peints, poignées de portes…). Les nombreuses publications, expositions et conférences consacrées à l’époque au Castel Béranger attestent de son immense succès. Exceptionnelle, cette reconnaissance assurait aussi à l’architecte la célébrité de son œuvre et sa propre promotion.

5. Le Studio Building

Concepteur prolifique, chantre de la notion d'œuvre d'art totale, Henri Sauvage (1873-1932) est considéré comme l’un des principaux architectes français du premier tiers du XXe siècle. Il fut ainsi l'un des premiers créateurs de sa génération à sentir la fin de l'Art nouveau, qu'il abandonna en 1909, et à percevoir la naissance d'une esthétique nouvelle, plus tard appelée Art déco, qu'il fut l'un des premiers à pratiquer.
Son "Studio Building", au 65, rue Jean-de-la-Fontaine, n'est toutefois pas un immeuble blanc à gradins tels que ceux qui ont fait la renommée de Sauvage, mais un bâtiment massif et polychrome. Construit entre 1929 et 1932, le bâtiment est l'un des immeubles d'habitation les plus singuliers du 16e arrondissement. Il comprend 50 logements et ateliers, dont l'un occupe plus de 230 m2!
L'immeuble est à l'époque destiné à des artistes: les appartements sont aménagés en duplex avec des ateliers éclairés par une verrière montant sur deux étages. Le béton armé de la structure est revêtu de carrelage gris pâle et jaune rayé de bleu, fourni par l'entreprise Gentil et Bourdet de Boulogne-Billancourt.
L'immeuble a été protégé en 1975 lors d'une campagne nationale sur l'architecture des XIXe et XXe siècles, et la façade ravalée en 1990. L'entrée principale se situe donc au 65, rue La Fontaine, mais ses façades donnent également sur la rue du Général-Largeau et la rue des Perchamps.
Henri Sauvage

De l’Art nouveau à l’Art déco, Sauvage est l’un des rares créateurs de sa génération à avoir constamment et méthodiquement renouvelé ses repères formels et ses références techniques. La rigueur constructive, la radicalité des choix et la qualité des détails servent un "rationalisme pragmatique". Les exigences esthétiques, techniques, urbanistiques et sociales de Sauvage ont ainsi préparé les expériences menées par plusieurs générations d'architectes. En premier lieu ceux qui se firent connaître dans les années 1920, comme Le Corbusier ou Mallet-Stevens, qui considérèrent Sauvage comme un précurseur de l'architecture dite moderne, à l'instar d'Auguste Perret ou de Tony Garnier.

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